« Libérez le poivron ! »

Résistance européenne contre la politique des brevets de Syngenta.

Aiguillon, Lausanne, Bern, Munich, le 3 février 2014.

Une large coalition européenne, regroupant 34 organisations
d'agriculteurs, de sélectionneurs ainsi que des ONG de 27 pays ont
déposé aujourd'hui un recours devant l'Office européen des brevets, à
Munich, contre un brevet sur le poivron accordé à Syngenta. Celui-ci
permet à l'entreprise agrochimique bâloise de s'approprier une
résistance aux insectes pourtant copiée d'un poivron sauvage. Par une
action épicée, la coalition a dénoncé l'appropriation de la nature par
des entreprises privées.

Le recours porte sur un brevet délivré à Syngenta, le 8 mai 2013 par
l'Office européen des brevets (OEB), qui garantit à la firme bâloise les
droits exclusifs sur tous les poivrons présentant une résistance aux
mouches blanches. Ce brevet est valable dans de nombreux pays européens
et empêche les agriculteurs et les sélectionneurs d'utiliser ces plantes
pour leur culture ou leurs sélections sans payer des droits de licence à
Syngenta. Or, cette résistance spécifique a été obtenue en croisant un
poivron sauvage, de Jamaïque, qui comporte naturellement des résistances
aux insectes, avec un poivron commercial. Il ne s'agit donc en aucun cas
d'une invention, mais tout au plus d'une découverte.

Avec ces partenaires européens, le Réseau Semences Paysannes dénonce
pleinement le brevetage du vivant. L'actualité française, notamment avec
le vote demain à l'Assemblée Nationale d'une proposition de loi visant à
mettre l'État au service des entreprises pour lutter contre les
contrefaçons, illustre les conséquences inacceptables qu'auraient le
développement de ce type de brevet couplé à la mise en place d'un
arsenal juridique répressif. Le tout aboutirait à la remise en cause
des droits les plus élémentaires des agriculteurs d'utiliser et
d'échanger leurs propres semences sans risquer d'être qualifié de
contrefacteur d'une plante contenant un caractère natif breveté ...

Jamais auparavant une coalition aussi vaste d'un point de vue
géographique et diversifiée au niveau des compétences n'avait engagé un
recours juridique formel contre la privatisation des ressources
naturelles. Les brevets sur le vivant sont non seulement problématiques
d'un point de vue éthique, mais ils accentuent aussi le phénomène de
concentration sur le marché des semences, réduisent la biodiversité et
menacent la sécurité et la souveraineté alimentaire. En mai 2012, le
Parlement européen avait pourtant adopté une résolution demandant à
l'OEB de ne plus accorder de brevet sur des produits obtenus par
sélection traditionnelle. Cependant, l'OEB a jusqu'ici ignoré cette
recommandation. ce qui a permis à Syngenta et d'autres
multinationalesd'en profiter massivement

La coalition, déposant aujourd'hui à Munich ses recours contre le brevet
de Syngenta, demande que les plantes et les animaux ne puissent plus
être brevetés. La révocation de ce brevet sur le poivron serait déjà un
premier pas important. Plus généralement, le Conseil d'administration de
l'OEB doit modifier les critères d'octroi des brevets afin d'en exclure
toutes les plantes et en priorité celles qui sont obtenues par sélection
traditionnelle.

Plus d'informations ici : http://www.evb.ch/fr/freepepper

Infographie: Comment un poivron naturel est devenu une plante brevetée
Rapport : La nature privatisée. Non au brevet de Syngenta sur le poivron

Contacts :

* François Meienberg, Déclaration de Berne, food@evb.ch
, 0041 44277 70 04(Suisse)
* Guy Kastler , Réseau Semences Paysannes, guy@semencespaysannes.org
: 06 03 94 57 21 (France).

(1) Pour plus d'informations sur ce point spécifique, voir :
http://www.semonslabiodiversite.com/?p=2801